Institut de France

Romain Teyssier

Le Grand Prix scientifique de la Fondation Simone et Cino del Duca – Institut de France, doté de 300 000 euros, est destiné à récompenser une équipe de chercheurs scientifiques français ou étrangers.

Mme Catherine Bréchignac, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, remet le Prix scientifique de la Fondation Simone et Cino del Duca au professeur Romain Teyssier.Le Prix 2011 avait pour thème : "Modélisation scientifique de phénomènes complexes, traitement de l’information associée et simulations numériques".

Le Jury, composé d’éminents scientifiques en majorité membres de l’Académie des sciences, a attribué ce Prix au professeur Romain Teyssier, ingénieur au CEA, et à son équipe afin de récompenser leurs découvertes majeures dans le domaine de la modélisation numérique des galaxies.

Le professeur Romain Teyssier

Ingénieur-chercheur au Service d’Astrophysique du CEA au sein du Service d’Astrophysique de l’Irfu (Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers), et professeur à l’Université de Zürich, le professeur Romain Teyssier a 41 ans.
Spécialiste des simulations numériques en astrophysique, connu mondialement, il se distingue par sa créativité. Le nombre d’articles dont il est l’auteur est particulièrement élevé pour un chercheur de son âge.

RAMSES, le code à raffinement adaptatif qu’il a développé, est un outil de pointe dans la simulation des phénomènes complexes en astrophysique, utilisé aujourd’hui par de nombreux astrophysiciens dans le monde. L’activité de son équipe COAST (COmputational ASTrophysics) remonte au début des années 2000, avec le lancement du projet Horizon dont Romain Teyssier fut le coordinateur, et qui a fédéré la communauté française autour du calcul intensif en cosmologie.

Des galaxies aux étoiles : une modélisation multi-échelle

La modélisation numérique est un outil récent de la recherche en physique, qui s’ajoute aux procédés traditionnels que sont la théorie et l’expérience, et permet leur confrontation.
Le code RAMSES, à raffinement adaptatif de maillage (en anglais AMR), a été utilisé avec succès pour modéliser la formation des galaxies dans un cadre cosmologique, la formation des nuages moléculaires au sein d’un disque galactique, ainsi que la formation de cœurs préstellaires dans un nuage moléculaire turbulent.

Le procédé AMR de ce logiciel RAMSES a permis de prendre en compte une gamme d’échelles spatiales gigantesque (9 ordres de grandeur), qui demandait normalement des tailles de mémoire absolument inaccessibles.

Dès son projet de collaboration Horizon, le professeur Teyssier a utilisé ce logiciel pour réaliser des simulations cosmologiques de la distribution des galaxies à grande échelle, parmi les plus importantes au monde. Son résultat majeur concernait le lien entre la formation des toutes premières galaxies et les courants froids cosmiques, qu’il avait découverts grâce à ses simulations numériques.

Plus récemment, Romain Teyssier et son équipe ont travaillé sur la morphologie des galaxies grâce à des simulations à très haute résolution. Ils ont mis en évidence le mécanisme de formation des galaxies primordiales. Ces différents travaux ont permis de montrer que la morphologie des galaxies dépend fortement de phénomènes internes, et non purement externes comme le considérait avant le modèle standard.

Prix Del Duca scientifique et projet de recherche

Très complémentaires par leurs talents, les chercheurs de l’équipe COAST apportent une expertise unique dans les domaines - séparés jusqu’alors - de la physique de la formation des galaxies, et de la physique de la formation des étoiles. Ils ont également le mérite de développer eux-mêmes leurs outils de calcul et de visualisation.

Romain Teyssier et son équipe COAST souhaitent continuer leur exploration de la formation des galaxies et des étoiles grâce à la simulation numérique. La puissance des ordinateurs devrait rendre possible le couplage entre des échelles jusqu’alors trop lointaines. Ils espèrent établir un lien entre les échelles stellaires, lieu de la formation des étoiles, et les échelles galactiques, qui permettrait d’expliquer les mécanismes de structuration de la matière dans l’univers.

C’est un domaine totalement nouveau qui met en jeu des techniques numériques inédites et de nouveaux ingrédients physiques. Ces travaux pourraient être généralisés aux autres galaxies qui peuplent la "toile d’araignée cosmique". Cette meilleure compréhension des mécanismes de structuration de la matière dans l’univers pourrait permettre de lever le voile sur le mystère de nos origines.

Au-delà du calcul intensif que représente la couverture d’une telle gamme d’échelles dans une même simulation, l’équipe COAST doit aussi développer les outils algorithmiques permettant de décrire les mécanismes physiques nécessaires à ce couplage d’échelles. À terme, ces outils seront inclus au code RAMSES et mis à la disposition de la communauté scientifique. Enfin, l’équipe s’emploie à rendre ses données visibles par le public et à produire des moyens de communication, d’où la nécessité de moyens de calcul locaux dédiés à l’équipe.